Journaliste, essayiste et écrivain français, Olivier Guez (°1974), qui en sus de sa langue maternelle, parle allemand, italien, espagnol et anglais, après avoir étudié à Sciences-Po Strasbourg, puis à la London School of Economics (LSE) et au Collège d’Europe de Bruges, travaille aujourd’hui comme journaliste indépendant pour plusieurs grands médias internationaux, dont le New York Times, Le Monde, le Frankfurter Allgemeine Zeitung, Le Figaro Magazine, L’Express, Le Point, Politique Internationale, Der Freitag, Der Tages Anzeiger, Das Magazin et Il Foglio.
Son roman biographique La Disparition de Josef Mengele, paru en 2017 chez Grasset, a remporté le prix Renaudot la même année.
Chez le même éditeur, il publie Mesopotamia, un roman inspiré par la vie et l’action de l’archéologue, exploratrice, écrivaine, femme politique, espionne et diplomate britannique Gertrude Bell, née le 14 juillet 1868 à Washington (Royaume-Uni) et morte dans la nuit du 12 juillet 1926 à Bagdad.
Née dans une famille de la haute bourgeoisie industrielle britannique, elle a suivi des études supérieures poussées et effectué dans sa jeunesse de nombreux voyages en Europe et au Moyen-Orient, ce qui lui permit d’acquérir une bonne connaissance de ces régions. Après plusieurs années consacrées à l’alpinisme, elle s’adonna pleinement à l’archéologie dans l’Empire ottoman à partir de 1905.
À partir de 1916, sa bonne connaissance de l’arabe, du persan et de la diplomatie de la région lui valut d’être la seule femme agente de liaison auprès des nationalistes arabes au sein du Bureau arabe, une antenne du département des renseignements du Commonwealth installée au Caire.
Bien que sous-estimée par ses pairs, son expertise du Moyen-Orient était largement reconnue par les officiels britanniques. Rattachée au Foreign Office, proche de Fayçal Ier[1] à partir de 1919, elle joua un rôle important en 1921 dans l’installation au pouvoir de la dynastie hachémite en Irak. Elle resta à la cour du roi où elle s’engagea dans la préservation du patrimoine irakien. On lui doit la création du musée national d’Irak. Elle est morte d’une surdose médicamenteuse alors que sa famille connaissait une passe difficile.
Figure paradoxale, elle était contre le droit de vote des femmes, mais a réussi à s’imposer parmi un monde d’hommes. De même, attachée au développement d’institutions archéologiques arabes, elle défendait cependant le « partage » des plus belles pièces avec les musées européens.
Gertrude Bell visitant les fouilles archéologiques de Babylone en 1909.
Longtemps éclipsée par la renommée de l’officier et écrivain Thomas Edward Lawrence[2], qui appartenait également au Bureau arabe et avec qui elle entretenait des liens d’amitié, Gertrude Bell « fut, écrit Olivier Guez, la première femme puissante de l’Empire britannique, mais aussi une héroïne tragique. Idéaliste comme son ami et frère d’âme Lawrence d’Arabie. Impérialiste et courageuse comme le jeune Winston Churchill. Enfant aimée et incomprise d’une riche famille victorienne. Amoureuse éperdue. Et une énigme pour nous : celle des femmes que l’Histoire a effacées ».
L’actrice australo-américaine Nicole Kidman (°1967) l’a incarnée dans le film biographique de Werner Herzog Queen of the Desert, sorti en 2015 et Olivier Guez lui rend aujourd’hui sa gloire dans un page turner passionnant, menant le lecteur de la découverte de gigantesques gisements pétroliers aux jeux de pouvoir implacables entre Britanniques, Français et Allemands, et de négociations complexes sous les tentes bédouines aux tempêtes de sable de Bagdad, dans le désert sauvage entre deux fleuves, le Tigre et l’Euphrate, contrée mythique et maudite, terre d’Abraham, du déluge et de Babel, tombeau d’Alexandre le Grand et de Gertrude Bell, la Mésopotamie…
PÉTRONE
Mesopotamia par Olivier Guez, Paris, Éditions Grasset, août 2024, 413 pp. en noir et blanc au format 14,4 x 20,6 cm sous couverture brochée et jaquette en couleurs, 23 € (prix France)
[1] Fayçal ben Hussein al-Hachimi, né le 20 mai 1885 à La Mecque et mort le 8 septembre 1933 à Berne, fut, sous le nom de Fayçal Ier, le premier roi d’Irak de 1921 à sa mort, après avoir été le premier et unique roi de Syrie du 7 mars au 24 juillet 1920.
[2] Thomas Edward Lawrence, dit Lawrence d’Arabie, né à Tremadoc (Caernarfonshire) dans le nord du pays de Galles le 16 août 1888 et mort accidentellement à motocyclette près de Wareham (Dorset) le 19 mai 1935, était un officier et écrivain britannique. Au cours du premier conflit mondial, il fut officier de liaison entre les Britanniques et les forces arabes durant la grande révolte arabe de 1916-1918. Portant le costume arabe, montant à chameau et ayant adopté nombre de coutumes locales, il combattit avec les troupes arabes sous le commandement de Fayçal ben Hussein al-Hachimi qui menait une guérilla contre les troupes de l’Empire ottoman. Après la guerre, la version abrégée de son témoignage sur cette campagne, Les Sept Piliers de la sagesse, qui en décrit le caractère aventureux, fut un succès de librairie. David Lean a réalisé en 1962 le film Lawrence d’Arabie, avec Peter O’Toole dans le rôle-titre, remportant un immense succès et sept oscars. (Sources : Wikipédia)