« Treize à table n’est à craindre qu’autant qu’il n’y aurait à manger que pour douze. » (Alexandre Grimod de La Reynière)

Petit-fils et fils de fermiers généraux[1], Alexandre Balthazar Laurent Grimod de La Reynière (1758-1837) était un avocat, négociant, journaliste, feuilletoniste et écrivain français célèbre à l’époque du règne de Napoléon Ier en raison de son humour spirituel et parfois acerbe, de son goût pour les mystifications et de son amour de la gastronomie qu’il entreprit de faire partager, notamment par ses écrits, principalement l’Almanach des Gourmands[2] (en 7 volumes, 1803-1810), le premier guide gastronomique de l’histoire, dont la publication commença sous le Consulat[3] et qui connut de nombreuses réimpressions, et le Manuel des Amphitryons[4] (1808) traitant de l’art de disséquer les viandes à table, de la composition des menus et de la politesse manducatoire.

Il est considéré, aux côtés de Jean Anthelme Brillat-Savarin (1755-1826), comme l’un des pères fondateurs de la gastronomie occidentale moderne.

C’est dans la collection « Le Goût de l’Histoire » dirigée par Jean-Claude Zylberstein aux Éditions Les Belles Lettre à Paris que Jean-Claude Bonnet, ancien directeur de recherches au CNRS et dix-huitièmiste distingué, présente ces deux ouvrages[5], dont il fut l’éditeur scientifique, sous le titre d’Écrits gastronomiques dans des textes établis par ses soins, un véritable régal d’informations non seulement culinaires et œnologiques, mais aussi historiques, sociologiques, économiques et saisonnières (s’agissant des produits de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage) de la vie élégante dans la capitale française au début du XIXsiècle, avec en sus de bonnes adresses où se fournir et où se délecter.

Extrait :

« Le brochet s’apprête d’une infinité de manières : on le mange à la genevoise, à l’allemande, à la sauce blanche, à l’étuvée, en casserole, en filets frits, en salade, farci, en terrine, en pâté-chaud, en tourte, etc. ; mais la manière la plus noble de le servir, c’est à la broche, piqué d’anguille, si c’est en maigre, et de lard, si c’est en gras. On a soin de l’arroser, pendant sa rotation, de bon vin blanc, vinaigre et jus de citron vert ; et, si l’on veut rendre la chose plus touchante, on le sert, quoique rôti, sur une sauce au coulis, dans laquelle on a fait fondre, comme par manière d’acquit, quelques anchois, et où l’on a fait amortir des huîtres avec des câpres et du poivre blanc. Rien de plus noble et de plus apparent qu’un brochet qui se présente ainsi ; mais l’on pense bien que, pour mériter autant d’honneurs, il faut qu’il soit d’une taille au-dessus de la moyenne. »

À se lécher les doigts !

PÉTRONE

Écrits gastronomiques – Almanach des Gourmands (Première année : 1803, contenant le calendrier nutritif et l’itinéraire d’un gourmand dans les divers quartiers de Paris) suivi du Manuel des Amphitryons par Alexandre Balthazar Laurent Grimod de La Reynière, texte établi et présenté par Jean-Claude Bonnet, Paris, Éditions Les Belles Lettres, collection « Le Goût de l’Histoire » dirigée par Jean-Claude Zylberstein, novembre 2024, 296 pp. en noir et blanc au format 12,5 x 19 cm sous couverture brochée en couleurs, 13,90 € (prix France)

TABLE DES MATIÈRES

Présentation

Almanach des Gourmands (1803)

Présentation

Almanach des gourmands

Préface des deux premières éditions

Calendrier nutritif

Itinéraire nutritif

Manuel des Amphitryons (1808)

Présentation

Manuel des Amphitryons

Préface

Première partie : Traité de la dissection des viandes

Seconde partie : Des menus

Troisième partie : Élémens de politesse gourmande

Conclusion

Annexes

I. Le fameux souper et les déjeuners philosophiques

II. Grimod et Mme de Genlis

III. Grimod et Rétif de la Bretonne

IV. Grimod jugé par ses pairs

V. Repères biographiques

VI. Bibliographie


[1] La Ferme générale étaitt la jouissance d’une partie des revenus du roi de France, consentie par ce dernier, sous certaines conditions, à un adjudicataire dont les cautions formaient la Compagnie des fermiers généraux, en l’occurrence une « union de plusieurs personnes qui s’associent pour entrer dans les affaires du Roi ». Créée par Louis XIV à l’initiative de Colbert en 1680, l’institution avait pour vocation de prendre en charge la recette des impôts indirects, droits de douane, droits d’enregistrement et produits domaniaux. Par extension, la Ferme générale étaitt le corps de financiers qui prenait à ferme les revenus du roi ; ils n’étaient donc pas de simples banquiers, mais également des gestionnaires de l’impôt. La Ferme n’assura pleinement l’ensemble de ces fonctions qu’entre 1726 et 1780. Les dirigeants et actionnaires de cette compagnie financière chargée du recouvrement de l’impôt étaient appelés les « fermiers généraux ». (Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ferme_g%C3%A9n%C3%A9rale)

[2] Almanach des Gourmands, servant de guide dans les moyens de faire excellente chère, par un vieil amateur, (7 volumes, 1803-1810).

[3] On appelle Consulat le régime politique de la France depuis le coup d’État du 18 Brumaire (9 novembre 1799) jusqu’à la proclamation du Premier Empire le 18 mai 1804 par Napoléon Bonaparte.

[4] Manuel des Amphitryons, contenant un traité de la dissection des viandes à table, la nomenclature des menus les plus nouveaux et des éléments de politesse gourmande – Ouvrage indispensable à tous ceux qui sont jaloux de faire bonne chère, et de la faire faire aux autres (1808).

[5] De l’Almanach des Gourmands, seul le premier tome est reproduit dans l’ouvrage.

Date de publication
mercredi 30 octobre 2024
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