Écrit sur l’art de résister…

Né en 1949 à Montpellier, Jean-Pierre Cabanes est un avocat pénaliste honoraire ayant exercé à Nîmes et un auteur d’une vingtaine d’ouvrages, parmi lesquels une fresque romanesque à succès, Rhapsodie italienne, parue en 2019 chez Albin Michel.

Son nouvel opus, L’annonce faite à Goering,publié dans la même maison, est un page-turner passionnant et bien documenté dans lequel son héroïne, Claire Wildenstein, la fille d’un marchand d’art juif, et son amant Werner Burckhardt, un officier allemand de la Kriegsmarine puis de l’ERR[1], antinazi et spécialiste des faux tableaux, déploient, dans le Paris occupé de la Seconde Guerre mondiale et ailleurs, mille ruses pour sauver la collection familiale qu’Hermann Goering[2] veut s’approprier.

De la conférence de Munich en 1938 aux procès de Nuremberg en 1945-46, on croise des acteurs majeurs des tragédies de l’époque, Adolf Hitler, Benito Mussolini, le comte Galeazzo Ciano[3] et son épouse Edda[4], Reinhard Heydrich[5], Otto Skorzeny[6], le grand-amiral Karl Dönitz[7], Joseph Goebbels[8] et son épouse Magda[9], les gestapistes français de la rue Lauriston, Jean Luchaire[10] et sa fille Corinne[11], Han van Meegeren[12], Rose Valland[13] et bien d’autres encore…

Une fresque d’envergure qui, de Berlin à Paris en passant par Rome, le ciel de Grèce et d’Albanie, Salonique, Salzbourg, l’Atlantique nord, New York, Rastenburg, le front russe et celui des Ardennes, Gargnano, Vérone, Innsbruck, la Pologne, Wannsee, Sigmaringen, Merano, Fresnes, la Suisse et Buenos Aires, inscrit magistralement son récit et ses personnages dans la Seconde Guerre mondiale.

PÉTRONE

L’annonce faite à Goering par Jean-Pierre Cabanes, Paris, Éditions Albin Michel, juin 2023, 395 pp. en noir et blanc au format 15 x 22 cm sous couverture brochée en couleurs, 22,90 € (prix France)


[1] L’Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg (Équipe d’intervention du Reichsleiter Rosenberg) était une section du bureau de politique étrangère du parti nazi (NSDAP), dirigée par Alfred Rosenberg, au sein de l’Office des Affaires étrangères du NSDAP. L’ERR a effectué à partir de 1940 d’importantes confiscations de biens appartenant à des Juifs et des francs-maçons dans les territoires occupés par la Wehrmacht.

[2] Pendant la durée du régime, le dignitaire nazi Hermann GÖRING (1893-1946), qui cumulait les fonctions de premier plan (numéro deux du Reich, créateur de la Gestapo en 1933, commandant en chef de la Luftwaffe en 1935 et ministre de l’Aviation, mais aussi responsable du Plan de quatre ans, ministre de l’Intérieur de Prusse, chef de la chasse du Reich et Reichsmarschall), a amassé une fortune gigantesque à coups de pressions, de rackets et de spoliation des biens juifs. Il est connu pour son goût du luxe, des diamants ou des châteaux, dont il ordonna la construction en pleine guerre. Condamné à mort par pendaison à l’issue du procès de Nuremberg en raison de ses crimes, il s’est suicidé en avalant une capsule de cyanure juste avant son exécution.

[3] Galeazzo CIANO, comte de Cortellazzo et de Buccari (1903-1944), était un homme politique italien, gendre de Benito Mussolini et personnalité majeure du régime fasciste. Issu d’une riche famille d’armateurs de Livourne1, il adhère très jeune au mouvement fasciste et participe en 1922 à la Marche sur Rome. Il fut ministre de la Presse et de la Propagande (du 23 juin 1935 au 5 septembre 1935), puis des Affaires étrangères (du 9 juin 1936 au 6 février 1943). Sur ordre de Mussolini, il fut condamné à mort et fusillé le 11 janvier 1944.

[4] La fille aînée de Benito Mussolini.

[5] Reinhard HEYDRICH (1904-1942) était un SS-Obergruppenführer allemand, responsable nazi de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Au moment de sa mort, il était à la fois le directeur du Reichssicherheitshauptamt (RSHA) et le « vice-gouverneur » du Reich en Bohême-Moravie. Adjoint direct de Heinrich Himmler dès 1933, il joua un rôle déterminant dans l’organisation de l’appareil répressif nazi et lors de l’élimination de la Sturmabteilung (SA) en tant que force politique, principalement lors de la nuit des Longs Couteaux à l’été 1934. Il a également tenu un rôle majeur dans l’organisation de la Shoah par la planification et le contrôle, entre 1939 et 1942, de l’activité des Einsatzgruppen, dont la mission principale dans l’Est de l’Europe était l’extermination des Juifs par fusillade, et lors de la conférence de Wannsee qui organisa la logistique des centres d’extermination, et qu’il présida le 20 janvier 1942. Le 27 mai 1942, il tomba dans une embuscade organisée par la résistance tchécoslovaque et le Special Operations Executive britannique et finit par mourir une semaine plus tard à l’hôpital, son état s’étant subitement dégradé à cause d’une surinfection inattendue de ses blessures.

[6] Otto SKORZENY (1908-1975) était un officier allemand et commando SS particulièrement connu en raison de ses missions réalisées lors de la Seconde Guerre mondiale, souvent sur ordre direct d’Adolf Hitler. Durant l’été 1943, il reçut de celui-ci comme consigne de retrouver Benito Mussolini, alors emprisonné en Italie, et de le libérer, ce qu’il fit.

[7] Karl DÖNITZ (1891-1980) était un Großadmiral et homme d’État allemand qu’Adolf Hitler désigna par testament comme son successeur à la tête du Troisième Reich.

[8] Joseph GOEBBELS (1897-1945) fut ministre de l’Éducation du peuple et de la Propagande nazie de 1933 à 1945, était un antichrétien radical et un antisémite fanatique ayant il a joué un rôle moteur dans les persécutions contre les Juifs allemands.

[9] Magda GOEBBELS (1901-1945) était la femme de Joseph Goebbels, ministre de la Propagande du Troisième Reich. Elle se donna la mort le 1er mai 1945 dans le Führerbunker à Berlin en compagnie de son époux Magda, après avoir a empoisonné leurs six enfants.

[10] Jean LUCHAIRE était un journaliste et patron de presse français, né le 21 juillet 1901 à Sienne (Italie) et mort fusillé le 22 février 1946 au fort de Châtillon. Son nom reste associé à la politique collaborationniste en raison de son rôle sous l’Occupation,

[11] Corinne LUCHAIRE (1921-1950) était une actrice française qui a évolué dans les milieux collaborationnistes durant l’Occupation, dans la foulée de son père Jean Luchaire. Elle est décédée jeune, atteinte de tuberculose pulmonaire.

[12] Le Néerlandais Han van MEEGEREN (1889-1947) était un peintre et un restaurateur d’œuvres d’art, mais aussi un faussaire qui extorqua entre 25 et 30 millions de dollars américains aux personnes qu’il escroqua. Il peignit un faux « Vermeer », Le Christ et la parabole de la femme adultère, qui se retrouva en possession d’Hermann Göring en échange de 200 toiles saisies dans les musées de Hollande.

[13] Rose VALLAND (1898-1980) était une conservatrice de musée et une résistante française. Elle joua un rôle décisif dans la sauvegarde et la récupération de plus de 60 000 œuvres d’art et biens culturels volés et spoliés par les nazis aux institutions publiques et aux familles juives françaises pendant l’Occupation.

Date de publication
mercredi 14 juin 2023
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