« Pour un pays, tout sera perdu lorsque les emplois d’économiste et de banquier deviendront des professions très respectées. » (Montesquieu)

Tout aussi excellemment scénarisé et bellement exécuté que le premier, le second tome de la bande dessinée intitulée Le banquier du Reich (chez Glénat à Grenoble) retrace le parcours, à partir du 20 janvier 1939, de Hjalmar Schacht.

Ce financier allemand hautement diplômé [1] et très imbu de sa personne, né à Tinglev dans l’Empire allemand (aujourd’hui au Danemark) le 22 janvier 1877 et mort à Munich le 3 juin 1970, créa le Rentenmark (1923) avant d’être le président de la Reichsbank (1924-1930 et 1933-1939) et le ministre de l’Économie du Troisième Reich (1934-1937).

Parmi ses créations les plus spectaculaires, citons le « bon MEFO », une monnaie parallèle reposant sur la création d’une société imaginaire, la Metallurgische Forschungsesellschaft, m.b.H., ou « MEFO », dont les titres servirent de monnaie d’échange convertible en Reichmarks sur demande et qui lui permirent de lever plus de dix millions de Marks-or.

Il fut renvoyé du ministère de l’Économie à sa demande en novembre 1937, à cause de différends portant notamment sur l’importance des dépenses militaires, qui créaient de l’inflation, et de relations conflictuelles avec Hermann Göring qui voulait sa peau. Il conserva son poste à la tête de la Reichsbank jusqu’au 20 janvier 1939, jour où Hitler le démit de ses fonctions, et fut ministre sans portefeuille jusqu’en 1943, titre essentiellement honorifique [2].

Cette éviction fut le point de départ de sa longue descente aux enfers.

Accusé d’être impliqué dans l’attentat du 20 juillet 1944 contre Hitler, Schacht fut interné dans divers camps de concentration (notamment Ravensbrück et Dachau) jusqu’à la fin de la guerre.

Il fut inculpé, puis acquitté par le Tribunal de Nuremberg avant de passer devant une juridiction de dénazification.

On découvre dans cet album la suite et la fin du parcours hors norme d’un personnage brillant, ambigu, énigmatique qui, à la fin de sa vie, participait à la relance économique de pays émergents.

Un homme qui, malgré ses parts d’ombre, reste l’un des plus grands économistes de tous les temps.

Saluons à nouveau les indéniables qualités de cette bande dessinée en tout point remarquable, tant sur le plan graphique que sur celui de l’information historique et de la mise en scène.

PÉTRONE

Le banquier du Reich (tome 2), scénario de Pierre Boisserie & Philippe Guillaume, dessins de Cyrille Ternon et couleurs de Céline Labriet, Grenoble, Éditions Glénat, septembre 2020, 56 pp. en quadrichromie au format 24 x 32 cm sous couverture cartonnée en couleurs, 14,50 € (prix France)


[1] De l’Université Louis-et-Maximilien de Munich, de l’Université de Leipzig, de l’Université Humboldt de Berlin, de l’Université de Paris et de l’Université de Kiel où il obtient un doctorat d’économie avec une thèse sur le mercantilisme.

[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Hjalmar_Schacht

Date de publication
mardi 6 avril 2021
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