Agrégée d’histoire (1996) et titulaire d’un doctorat d’État (2001), Céline Borello (°1971) est professeure d’histoire moderne à l’université du Maine-Le Mans. C’est une spécialiste du protestantisme moderne, à qui l’on doit notamment Les Protestants de Provence au XVIIe siècle (Champion, 2004), Œuvres protestantes en Europe (sous sa direction aux Presses Universitaires de Rennes, 2013), La République en chaire protestante XVIIIe-XIXe siècles (Presses Universitaires de Rennes, 2017) ou encore Dieu, César et les protestants, Anthologie de discours pastoraux sur la res publica 1744-1848 (Champion, 2019).
Aux Presses universitaires de France, elle a publié récemment une biographie passionnante de Catherine de Médicis, l’une des reines les plus critiquées de l’histoire de l’Hexagone.
Catherine de Médicis est née le 13 avril 1519 à Florence (République florentine) sous le nom de Caterina Maria Romola di Lorenzo de’ Medici et est morte le 5 janvier 1589 à Blois.
Nièce du pape Clément VII[1] et fille de Laurent II de Médicis (1492-1519), duc d’Urbino, et de Madeleine de la Tour d’Auvergne (1498-1519), elle grandit en Italie d’où elle est originaire par son père. À la mort de ses parents, elle hérite du titre de duchesse d’Urbino et de comtesse de Lauragais, puis de celui de comtesse d’Auvergne à la mort de sa tante Anne d’Auvergne en 1524.
Par son mariage avec le futur Henri II, elle devient Dauphine et duchesse de Bretagne de 1536 à 1547, puis reine de France de 1547 à 1559. Mère des rois François II, Charles IX et Henri III (les « derniers Valois »), ainsi que des reines Élisabeth d’Espagne et Marguerite (dite « la reine Margot », épouse du futur Henri IV) et de Claude, duchesse de Lorraine et de Bar, elle gouverne la France en tant que reine-mère et régente de 1560 à 1563.
Catherine de Médicis est une grande figure du XVIe siècle et du royaume de France. Son nom est attaché aux guerres de Religion opposant catholiques et protestants. Qui plus est, une rumeur persistante la dépeint comme une personne acariâtre, jalouse du pouvoir, ne reculant devant aucun crime pour conserver son influence.
Partisane d’une politique de conciliation, elle est pourtant l’instauratrice en France de la liberté de conscience pour les protestants, et elle a tenté à de nombreuses reprises de faire accepter le concept de tolérance civile. Avec l’édit de janvier 1562, elle vise à instaurer la liberté de culte, mais ne parvient pas à empêcher le déclenchement des hostilités.
Après la surprise de Meaux en 1567[2], sa fermeté et sa méfiance envers les protestants se renforcent. Son rôle supposé dans le massacre de la Saint-Barthélemy en 1572 contribue à en faire une figure controversée de l’histoire de France.
Elle fut aussi l’un des plus grands mécènes de son temps. Femme cultivée, Catherine de Médicis a contribué à diffuser en France les mœurs et le goût – y compris culinaire – italiens. Elle a fait agrandir le Louvre et construire le palais des Tuileries.
Et pourtant, elle attire encore de nombreuses haines. Son caractère dissimulé, son habit noir, son goût mélodramatique pour les devins[3] et les intrigues « florentines » lui vaudront une réputation de conspiratrice largement usurpée.
La vie de Catherine de Médicis, riche tant d’un point de vue politique que culturel, a en effet alimenté nombre de rumeurs et de fantasmes, créant ainsi une véritable « légende noire »[4].
Les pamphlets et les tableaux du XVIe siècle, puis des écrivains comme Voltaire dans son Essai sur les mœurs et l’esprit des nations (1756) ou Alexandre Dumas dans La Reine Margot (1845) ont contribué à la discréditer tandis que des historiens ne l’ont guère mieux présentée, à l’instar de Jules Michelet qui la nomme « l’immonde Jézabel » dans son Histoire de France au XVIe siècle (1855-1856), contrairement toutefois à Honoré de Balzac qui avait tenté un plaidoyer en faveur de la reine dans son Sur Catherine de Médicis (1846).
Aujourd’hui, la tendance historiographique vise à réhabiliter le rôle de cette reine et régente qui occupa une place sans égale sur l’échiquier politique du royaume et qui usa de son influence au cours d’une période complexe et très troublée.
Allant dans ce sens, la biographie que lui consacre Céline Borello rétablit avec beaucoup de subtilité une vérité historique tout en nuances du meilleur aloi.
PÉTRONE
Catherine de Médicis par Céline Borello, Paris, Presses universitaires de France, janvier 2021, 214 pp. en noir et blanc au format 11,5 x 17,7 cm sous couverture brochée en couleurs, 14 € (prix France)
SOMMAIRE
INTRODUCTION
I. – UNE FILLE DE BANQUIER ITALIEN DEVIENT DAUPHINE DE FRANCE
– Enfance mouvementée et premiers apprentissages
– Mariage princier et premières années à la cour de France
– La dauphine de France
II. – UNE FEMME DE POUVOIR
– L’apprentissage symbolique du pouvoir sous le règne d’Henri II
– La mort du roi et l’entrée en scène progressive de catherine de Médicis
– Catherine de Médicis face aux guerres de religion
III. – UNE FEMME DE LA RENAISSANCE
– Patronage et mécénat actifs
– Les jardins et les fêtes ou l’art d’éblouir
– Une reine cultivée et attentive à l’éducation de ses enfants
IV. – MORT ET POSTÉRITÉ D’UNE FIGURE AU DESTIN HORS DU COMMUN
– La mort, une compagne à apprivoiser… et à affronter
– Rumeurs et « légende noire »
– Catherine : une image, une figure historique
CONCLUSION
CHRONOLOGIE
BIBLIOGRAPHIE
SÉLECTIVE
[1] Jules de Médicis, né le 26 mai 1478 à Florence et mort le 25 septembre 1534 à Rome, fut le 219ᵉ pape de l’Église catholique de 1523 à 1534 sous le nom de Clément VII.
[2] La surprise de Meaux (aussi appelée la « bataille de Meaux ») est une conspiration organisée en 1567 par Louis Ier de Bourbon-Condé, un des principaux chefs protestants, pour enlever le roi de France, Charles IX, et la famille royale. Cet événement déclencha la deuxième guerre de Religion (1567-1568).
[3] Elle s’entoure d’astrologues, parmi lesquels Michel de Nostre-Dame dit « Nostradamus » (1503-1566).
[4] Voir aussi Catherine de Médicis — Wikipédia (wikipedia.org) et Catherine de Médicis (1519 – 1589) – La régente noire – Herodote.net.