Par les temps qui courent de populisme électoraliste et de déliquescence subséquente des contenus des programmes scolaires, en guise de réplique aux cuistres et aux ignares qui ont décidé de trucider l’enseignement du latin sous prétexte qu’il s’agit d’une langue morte, et pour infliger un camouflet aux « pédagogues » des gogues ministériels qui voient dans l’étude de la langue de César et dans la lecture de Sénèque des pratiques suspectes parce qu’« élitistes », mot cache-sexe de leur incurie, de leur démagogie et de leurs aigreurs jalouses, osons un acte de résistance : la consultation quotidienne du Dictionnaire latin et du Vocabulaire latin parus chez Larousse, deux ouvrages collectifs accessibles à tous et ô combien passionnants, qui plongent leur utilisateur au cœur des origines de notre langue, mais aussi de la plupart de celles du pourtour méditerranéen ainsi que de la culture de l’Europe de l’Ouest, de l’Afrique francophone et du Maghreb.
C’est que l’enjeu est d’importance, celui du vivre ensemble, du penser ensemble et du parler ensemble dans le respect de tous et de soi-même, car, comme l’assurait Malcolm X peu de temps avant son assassinat : « Vous ne pouvez pas haïr les racines d’un arbre et ne pas haïr l’arbre tout entier ».
Aujourd’hui, parmi les jeunes générations, la faillite de l’orthographe et du vocabulaire est patente, avec son lot d’incompréhension du discours des autres, d’incapacité à lire les textes littéraires – et pas seulement – et de formatage de la pensée en stéréotypes et en slogans puérils.
Il suffit, par exemple, de lire la presse, papier ou sur Internet, pour s’en convaincre…
Or, ce n’est pas tant à la capacité plus ou moins grande des jeunes à apprendre ce qu’on leur enseigne qu’il faut imputer cette faillite (il y a toujours eu de bons élèves, des moins bons et des cancres…), mais bien à l’incapacité et à l’incompétence de nombre de leurs maîtres, eux-mêmes incapables d’écrire sans fautes d’orthographe et de syntaxe…
Qui bono ? À qui profite le crime, comme le demandait Cicéron avec insistance dans un plaidoyer fameux ?
À la société tout entière, qui a dévalorisé l’école et ses enseignants et continue de le faire, au point que des régiments entiers de ceux-ci quittent la profession ou l’exercent avec dépit, quand ce n’est pas la boule au ventre, et pas uniquement dans les écoles-poubelles, tant leur rôle et leur statut sont décriés…
Fort logiquement, la formation des profs a suivi une courbe descendante orientée, dans certaines branches, vers la spécialisation technique et, dans d’autres, vers l’apprentissage ludique, tout en faisant passer la culture générale et langagière par pertes et profits…
Aujourd’hui, les écoles normales et les universités octroient des diplômes de formateurs à bien des récipiendaires sans grandes connaissances grammaticales – un concepteur de programmes nous a même un jour assené qu’avec une quinzaine de règles, on évite 80% des fautes, et que c’est bien suffisant… –, dont le mémoire de fin d’études et les préparations de cours sont truffés d’erreurs de français, et on tolère qu’ils sévissent ad vitam perpetuam dans des classes au sein desquelles ils distillent leur inculture sans se remettre en question !
Or, à quoi sert de savoir encoder un texte en Word si on est incapable de le rédiger ou de comprendre ce que l’on recopie ? À quoi sert d’apprendre une langue étrangère quand on ne connaît pas – ou à peine – sa langue maternelle ? À quoi sert un raisonnement scientifique mal étayé ? À quoi sert une pensée brouillonne ?
Et que l’on ne vienne pas nous taxer d’intentions ségrégationnistes !
Les plus habiles utilisateurs de la langue française ne sont-ils pas de nos jours des écrivains maghrébins, libanais ou congolais, à l’instar de Tahar ben Jelloun, Amin Maalouf, in Koli Jean Bofane ou Valentin-Yves Mudimbe ?
Il est vrai qu’ils ont été, chez eux, à bonne école…
Bien entendu, notre philippique, si elle ne vise pas collectivement les élèves, ni même les enseignants – comment leur reprocher d’ignorer ce qu’on ne leur a pas appris dans leur cursus ? –, ne plaide pas non plus pour que tout le monde apprenne le latin et obligatoirement à une culture classique que d’aucuns trouveraient surannée.
Mais de là à ce que plus personne n’y ait accès, il y a de la marge !
Il est au contraire urgent de revenir aux fondamentaux et de réorienter les enseignants vers une maîtrise approfondie de la grammaire, de l’orthographe et du vocabulaire français, la langue étant le vecteur le plus efficace de la transmission du savoir !
Revenons maintenant à nos outils :
Le Dictionnaire latin s’avère très complet, puisqu’il contient :
– 150 000 mots, expressions et traductions,
– un dictionnaire de version (latin-français),
– un dictionnaire de thème (français-latin),
– toutes les formes des noms, verbes et adjectifs latins,
– un grand nombre d’exemples et de citations,
– des locutions et proverbes expliqués.
Avec un éclairage pédagogique sur la civilisation latine :
– 5 000 noms propres commentés (personnages, institutions et lieux),
– des développements culturels,
– une chronologie, le calendrier latin, les poids et mesures.
Quant au Vocabulaire latin, il présente :
– tout le vocabulaire de base,
– une organisation par thèmes (la politique, la religion, le sport, les campagnes militaires, les métiers, les animaux),
– des explications sur l’emploi et la formation des mots,
– des notes et astuces pour mémoriser certaines constructions, déjouer les pièges classiques ou résoudre des difficultés grammaticales,
– des aides sur la prononciation,
– une structure claire et une présentation attrayante,
– des exercices et des jeux simples avec leurs corrigés pour vérifier ses acquis.
Un bien beau corpus scripti, comme dirait Marcel moreau…
PÉTRONE
Dictionnaire Larousse latin-français & français-latin, ouvrage collectif, Paris, Éditions Larousse, collection « Maxi Poche + », juin 2016, 956 pp. en noir et blanc au format 13,5 x 19,8 cm sous couverture Intégra en couleurs, 10,95 € (prix France)
Vocabulaire latin, ouvrage collectif, Paris, Éditions Larousse, collection « Les clés de la réussite », juin 2016, 224 pp. en quadrichromie au format 12,8 x 19 cm sous couverture brochée en couleurs et à rabats, 7,90 € (prix France)