Le juriste, bibliographe, pacifiste et utopiste belge Paul Otlet (1868-1944), dont l’ambition était de permettre aux hommes de mieux se connaître, de ne plus avoir peur les uns des autres et de vivre en paix, est l’inventeur en 1905 de la CDU (Classification décimale universelle), toujours en usage aujourd’hui, et il est aussi le père du fameux standard de 12,5 x 7,5 cm pour les fiches bibliographiques.
Après avoir créé le Palais Mondial-Mundaneum de Bruxelles, situé dans l’aile sud de ce qui est devenu ensuite le « Cinquantenaire », il a développé dans l’entre-deux-guerres le projet d’une Cité mondiale, entièrement dédiée à la connaissance, avec, entre autres, la collaboration de Le Corbusier.
Son objectif était de réunir les peuples par une civilisation universelle, considérée métaphoriquement comme un « pont mondial » (1937). Il rejoignait en cela les projets d’encyclopédie universelle élaborés à la même époque par H. G. Wells dans World Brain et par le philosophe et sociologue Otto Neurath.
Souhaitant établir un réseau et une coopération internationale entre les bibliothèques et les bibliothécaires, il avait créé en 1895, avec Henri La Fontaine (1854-1942), l’Office international de bibliographie et mis en place un « répertoire bibliographique universel » (RBU), rassemblant tous les ouvrages publiés dans le monde, quels que soient le sujet et l’époque. Cet Office visait également à faire reconnaître l’information comme discipline scientifique.
Il a aussi travaillé avec La Fontaine à l’établissement d’une Bibliographica sociologica, qui visait à répertorier l’ensemble des « faits » et des « écrits » concernant la société. En 1895, celle-ci comprenait 400 000 notices.
En 1910, il a mis au point avec son collègue Robert Goldschmidt la Bibliophoto, sorte de bibliothèque portable de microfiches [1].
L’intérêt pour Paul Otlet, considéré comme le père des sciences de l’information, n’a cessé de grandir ces dernières années, particulièrement aux États-Unis, où son œuvre a été comparée dans le New York Times à un « Web oublié du temps ».
Son Traité de documentation – Le livre sur le livre (1934), ouvrage fondateur et fondamental récemment reparu en fac-similé aux Impressions nouvelles à Bruxelles avec des préfaces de l’écrivain Benoît Peeters, de l’universitaire Sylvie Fayet-Scribe, maître de conférences à Paris I, Panthéon-Sorbonne, et d’Alex Wright, collaborateur du New York Times, est l’aboutissement de son travail inlassable pour rassembler, classer et partager les connaissances.
Paul Otlet y propose une remarquable synthèse du savoir sur le livre et le document, en même temps qu’il anticipe Internet et l’hypertexte. La réédition du Traité de documentation, 70 ans après la disparition de son auteur, coïncide avec la réouverture du Mundaneum à Mons [2], capitale européenne de la Culture en 2015, ville où le fabuleux héritage documentaire légué par Paul Otlet et Henri La Fontaine est conservé.
Un ouvrage visionnaire qu’il faut voir… et avoir !
PÉTRONE
Le livre sur le livre – Traité de documentation par Paul Otlet, préfaces de Benoît Peeters, Sylvie Fayet-Scribe et Alex Wright, Bruxelles, Les Impressions nouvelles, août 2015, 431 pp. en noir et blanc au format 20,5 x 26,5 cm sous couverture cartonnée en couleurs, 38 €
[1] Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Otlet
[2] 76, rue de Nimy à B- 7000 Mons. Téléphone : 0032 65 31 53 43 Fax : 0032 65 39 54 86 Email : info@mundaneum.be